du 25 juin au 28 juin 2009 

Des personnages coupés dans un cadre, de dos, flou, presque non identifiables, gisent dans les déchets et les décors éphémères, leurs couleurs fondent dans ce territoire insolite d’un chantier d’un immeuble, une vie se crée dans un sous sol sombre et un rez- de- chaussée orné de brouettes, sable, sueur,…
Une vie à part, un refuge, un asile forcé peut être, par besoin de travail mais, malicieusement apprécié par ces protagonistes, un lien nait entre eux, ils se cloitrent dans leur monde, un monde où une rue les sépare eux et nous et le reste qui côtoie ce quartier « chic » d’une ville balnéaire en Tunisie.
Du travail, de l’attente aussi, une attente d’une eau qui chauffe, une attente pour tuer le temps, une attente pour finir le travail et une attente jusqu’au prochain territoire, avec peut être d’autres personnes, mais des personnes qui se ressemblent c’est sure.
J’enjambe les dalles qui séparent les deux univers, l’accès est facile, on y pénètre sans aucune résistance apparente, on s’installe (moi et ma caméra) parmi eux, on filme.
La caméra enregistre tout objectivement ou presque, pour souligner ce bouclier qui les cerne. Un lieu plein de tout et de rien les abrite, des repères virtuels les conditionnent, des murs imperceptibles organisent cette vie en communauté, « des chambres », « une cuisine », « une douche », c’est ainsi qu’ils les désignent ; alors ma caméra peine à voir ces murs fantômes et les séparations entre ces différents lieux de vie imaginaire.
On s’estompe, ma caméra et moi, dans ce périmètre, cette masse de gens, ils s’ouvrent à nous le moment d’une douche, d’un déjeuner ; l’image est là plus nette, le cadre est plus large, le contraste est plus accentué, la couleur est fulminante.
Jouent ils avec mon claire/obscure, avec mon flou/net ; ou c’est moi qui joue avec eux, avec leur quotidien si commun et inédit à fois, en les exhibant des fois et en les inhibant dans d’autres ?
le montage des séquences est brute (sans effets de fondu mais à part une scène au début et une autre à la fin), afin de préserver le caractère rude de l’environnement des sujets filmés et afin de couper ce petit morceau de réel et de le transposer sur les bandes de la caméra sans artifice ni exagération, les séquences et les plans sont manipulés avec soin et délicatesse tel un chirurgien , pour ne pas altérer une mémoire, la mémoire de ces ouvriers qui s’efface et tombe généralement dans l’oubliette, la mémoire des gens qui ne cherchent pas vraiment à témoigner ni à perdurer dans le temps, c’est juste le temps d’un échange furtif, sans grande importance mais avec beaucoup de vérité et de profondeur.

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